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28 janvier 2011 5 28 /01 /janvier /2011 15:14

Texte d'Elie Corrado

 

J’allais à l’école maternelle de l’Abbaye, j’étais un gamin en culottes courtes. Durant cette période, la faim était une obsession pour tout le monde. En face de chez nous, au premier étage, logeait un petit groupe de soldats allemands. Ils avaient l’habitude de se laver torses nus à la borne fontaine qui se trouvait dans la rue Tisserie.  Qu’est-ce qu’ils pouvaient être bruyants !

Leur logement communiquait avec la place de L’Abbaye et par la fenêtre ils jetaient des tranches de pain aux gamins du quartier et j’étais de ceux qui n’arrivaient jamais à en avoir, j’étais bien trop petit ! Une fois, c’est un petit chien blanc qui réussit à attraper une tranche de pain, il la tenait dans sa gueule et courait car j’étais parti après lui, mais je ne l’ai pas rattrapé. Il allait bien trop vite malgré son allure en oblique. Cette image m’est toujours restée  en mémoire.

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Pendant la journée, le haut de la rue Tisserie, côté Basse-Place St Jean était parfois très animé du côté de la maison close. On entendait une langue inconnue qui n’était pour moi qu’un brouhaha et parfois on voyait des soldats qui descendaient la rue en petits groupes. Un jour, je me suis trouvé au milieu d’un de ces groupes et j’en fus d’ailleurs très surpris moi-même. Un soldat m’attrapa, me prit dans ses bras. J’ai eu très peur et j’appelais ma maman à grands cris. Ma mère arriva très vite, me retira avec tellement de force qu’elle me fit mal au bras et me gronda. Pourtant, enfants, nous avions appris à faire « méfi », la consigne était de ne pas s’approcher d’eux. Je pleurais : ce n’était pas à cause des reproches de ma mère mais parce que j’avais très mal au bras etje me suis bien gardé de le lui dire, trop content qu’elle m’ait tiré de là !

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A la libération d’Alès, on a pu s’aventurer plus loin et découvrir ainsi d’autres quartiers. Je me souviens d’un char d’assaut en arrêt sur le côté du Grand Café du Gambrinus. Il en sortit des soldats-marins reconnaissables à leurs bérets. En les voyant les filles essayaient de toucher leurs pompons : ils avaient beaucoup de succès auprès de la gente féminine !

Sous les platanes de la place Gabriel Péri, il y avait un petit véhicule (j’ai su plus tard que c’était une jeep) avec deux hommes à bord : un blanc et un à la peau toute noire. C’était la première fois que je voyais un noir et c’est lui qui m’a donné mon premier chocolat : qu’il était délicieux ce premier chocolat ! L’autre soldat me donna une petite barrette  en papier, à l’intérieur il y avait un bonbon tout rouge qu’il fallait seulement mâcher : c’était mon premier chewing-gum mais il faisait  mal aux gencives !

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Toujours au moment de la libération, j’étais sur la place de l’Abbaye quand j’ai entendu monter des cris de la rue de la République. Je regardais et vis un attroupement de gens qui criaient très fort mais je ne saisissais  pas le sens des mots. Je me suis mis au milieu de la rue pour mieux voir. Une « masse » de personnes se rapprochait très rapidement, telle une marée humaine, entourant une femme au corsage ouvert. On lui criait dessus, elle était frappée et recevait des crachats en plus !

Cette scène était d’une violence que je ne connaissais pas. Pourquoi ?

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Voilà un regard d’enfant qui découvrait mais ne comprenait pas toujours !

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